Richard Appréderis, une géométrie cinétique

« Chaque œuvre a pour support un « motif »figuratif. Mais à partir de ce motif Richard Appréderis va user d’un langage géométrique afin que le sujet soit réduit à un ensemble de courbes, d’oves et d’ovales. De cette géométrisation naissent des figures plus ou moins visibles, plus ou moins discernables, plus ou moins immédiatement lisibles.

Ce n’est, en effet, que peu à peu, que le regard prend possession du tableau : parmi ces courbes, ces volutes, ces lignes s’ouvrant et se refermant se découvre soudain – et l’on est surpris de ne pas l’avoir vu plus tôt – un nu, ou une Léda, ou une Madone.

Cette manière de géométriser, cette façon de poser la couleur qui rappelle parfois celle utilisée par les cubistes engendrent sur la toile des rythmes et lui confèrent un mouvement certain : d’une forme en naît une autre, les volumes se dédoublent et le regard se trouve entraîné à la suite de ces courbes qui s’enroulent et se déroulent…

D’un visage de face naît un profil et l’on se retrouve devant un personnage dédoublé, d’une femme émerge un cygne et c’est l’histoire de Léda. Tout dans cette œuvre, est à rebondissements. On n’est jamais sûr de rien ; un volume en cache un autre, une courbe en dissimule une autre et de fil en aiguille le regard reconstruit ce qu’il avait pris, un peu trop tôt, pour de l’abstraction.

L’œuvre est intéressante de par ses secrets qu’elle ne livre que lentement. Elle ne se donne pas au regardant, elle fait appel à lui. Et la rencontre œuvre-spectateur n’a lieu que si le second fait l’effort de conquérir ces formes et ces volumes. »

B.-P. Cruchet / Gazette de Lausanne 26.11.1985